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Ski-touring : La Svanétie

4750 mètres d’altitude, la corde se tend dans mon dos, je dois m’arrêter.
Stef et Tato, notre guide, sont devant moi, ils se retournent, interrogatifs. A mon tour je regarde derrière moi, Jid me fait un signe que je n’ai pas envie de comprendre. « Allez Jid ! On y est presque ! » La tête baissée, il s’appuie lourdement sur ses bâtons, je connais cette posture, je l’ai déjà vécue. C’est le moment où l’on sait qu’il faut s’arrêter, où l’on sait que c’est la fin, on ne pourra pas aller plus haut aujourd’hui, qu’il faut faire demi-tour si près du but, si près du sommet. Ces 300 mètres qui me séparent de ce point, ce petit point noir dessiné sur la carte, accompagné d’un chiffre, 5047 mètres. Je le regarde depuis quelques semaines, je l’imagine, je me vois déjà là-haut, c’est notre but final, le point culminant de notre voyage. On ne le verra que de loin.

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Deux semaines plus tôt, nous avons atterri à l’aéroport de Batumi pour rejoindre Jérôme, dit Jid, qui nous attendait depuis deux jours sur place pour terminer l’organisation des 3 semaines à venir. L’idée du voyage est de découvrir les montagnes du Caucase en partant de la Mer Noire pour arriver sur les côtes de la Mer Caspienne. En bivouac, en refuge ou chez l’habitant, nous voulons nous immerger dans la culture du pays, rencontrer les Géorgiens et profiter des belles pentes enneigées du massif.

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En privilégiant les transports locaux, sorte de petits bus plus ou moins rapides, plus ou moins rouillés, nous sommes tout de suite dans le bain de la vie quotidienne. Sous des apparences un peu rustres, les Géorgiens sont toujours chaleureux, bienveillants et curieux de savoir ce qui nous amènent ici. Ils sont très fiers de leur pays, heureux de nous le faire découvrir. Grâce à Jérôme qui parle Russe et quelques mots en Géorgien, nous sommes toujours bien accueillis et nous profitons des bons conseils des locaux que nous rencontrons.

Par des routes escarpées, nous arrivons en Svanétie après quelques heures de Marushka (petit bus ou camionnette) dans le village de Mazeri, qui se trouve au pied du mont Ushba (4710 m). C’est un peu le bout de la route et nous posons nos affaires pour quelques jours chez Batcho qui a amménagé des chambres d’hôtes dans la maison familiale. Nous sommes accueillis par sa mère, son frère et tous les animaux de sa petite ferme, notamment Bobby, un grand chien de berger. Au réveil, Batcho nous demande si nous avons entendu les hurlements de loups cette nuit… Pas d’inquiétude selon lui, ils n’attaquent jamais les hommes, nous voilà rassurés. Et pour enfoncer le clou, Batcho nous explique comment faire peur aux ours, même si selon lui, il y a peu de chance que l’on en aperçoive. On croise les doigts.

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Pendant que sa mère nous prépare des bons petits plats hyper caloriques, nous nous organisons pour passer les deux prochains jours en montagne : bouffe, tente, matelas, duvet, le matériel photo et vidéo… On part avec au moins 20 kg chacun sur le dos, dans un chemin boueux qui traverse le village et qui nous mène dans les bois et vers la première montée. Nous sommes heureux de poser le bivouac pour une nuit à côté de la petite chapelle du Mont Mézir à 2500 mètres, après les 900 mètres de dénivelé à travers les bois. Depuis le départ du village nous avons 2 compagnons de plus, Bobby, notre berger du Caucase et un chien court sur pattes, que Jérôme baptisera Trompette, qui ne nous lâchera pas d’une semelle.

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Installation du camp, allumage du feu, petit goûter et on en profite pour faire un rappel des règles de sécurité et un entraînement à la recherche avec DVA. Le soleil est encore haut et nous ne résistons pas à l’envie de monter un peu plus haut pour goûter notre première descente dans la neige Géorgienne et profiter d’un coucher de soleil sur le Mont Ushba qui est quasiment à la frontière russe.

Après un bon dîner, la température baisse vite : les parois de la tente sont gelées et nous filons nous mettre à l’abri dans nos duvets. La nuit est totalement noire, aucune lumières aux alentours, le village est à quelques heures, nous sommes seuls au milieu de la montagne. Je m’assoupis assez rapidement, mais je suis réveillé brutalement par les aboiements des chiens qui montent la garde autour de la tente. On les entend courir après quelque chose pendant un bon moment et je pense qu’on s’est tous les trois rappelés ce que disait Batcho le matin même.

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Réveil matinal, il fait encore nuit et très froid mais nous voulons arriver au sommet du Mont Bak avant que le soleil ne réchauffe la neige. Après un bon petit déjeuner pour nous et pour nos chiens, nous plions la tente et partons pour le premier sommet du voyage. La neige est bien gelée et pour ne rien arranger j’ai oublié mes couteaux, Stef m’en prête un et nous avançons sur cette pente raide. Nous finissons à pieds, toujours accompagnés de nos chiens qui restent à l’aise et nous narguent en marchant en bord de crête. Au somment, à 3286 mètres, on savoure le paysage et l’effort que l’on vient de faire ensemble. La vue est magnifique, Stef et moi sommes rassurés d’avoir assuré la montée, reste à voir ce que la descente va donner.

Le départ est un peu tendu pour moi qui ai le niveau le moins élevé en ski, mes compagnons s’étant rencontrés chez les Chasseurs Alpins. Passés les trois premiers virages et avec leurs bons conseils, le reste de la descente n’est que plaisir dans une neige un peu lourde. Nous arrivons au village, toujours accompagnés de nos chiens qui ont descendu les pentes aussi rapidement que nous et nous montrent maintenant le chemin vers la maison de Batcho.

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Malheureusement, la météo des jours suivants ne nous permettant pas de faire d’autres randos autour du village, nous choisissons de partir vers la seconde étape de notre voyage…

Prochain chapitre, la Kazbegi

One comment

  1. Très inspirant, j’ai hate de lire la suite et de voir d’autres photos.
    Merci pour ce partage.

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