Depuis cette année, l’Endurance Trail des Templiers est devenue une des deux courses qualificatives pour pouvoir prétendre à courir la fameuse Western State en Californie. C’est ce qui m’a décidé à prendre le départ pour la 3ème fois sur ce parcours, motivé par l’idée de pouvoir m’inscrire sur cette course qui fait partie de ma “bucket liste”, un de mes rêves les plus fous. L’Endurance Trail a été un peu rallongée par rapport aux années précédentes, 4 kilomètres de plus pour étirer le peloton avant d’attaquer la première montée au-dessus de Carbassas et de découvrir le premier causse, le Causse Noir. C’est grâce à l’invitation de Gore Wear que j’ai pu prendre le départ dans des conditions optimales puisque nous étions logés à 5 minutes de la ligne de départ, et pour une fois je ne dormais pas dans une tente humide ou un van, et ça change pas mal de choses. L’équipe constituée de journalistes et de sportifs/sportives parisiennes et lyonnaises avait pu suivre les conseils d’entraînement de Yoann Stuck et était inscrite sur les différents formats du Festival des Templiers, allant du 18 km jusqu’au Grand Trail des Templiers, une des premières courses de trail-running en France.
Nous nous étions tous vu lors de différents événements comme le Trail de la butte Montmartre ou pendant une séance de seuil à Meudon avec Yoann. Pour la plupart déjà bien expérimenté, c’était un rendez-vous principal de l’année et l’objectif était évidemment de se faire plaisir sur une distance adaptée. Équipés comme des pros avec la dernière collection de Gore Wear adaptée au trail, notamment la veste SHAKEDRY R7, prête à recevoir la pluie qui est parfois de la partie à cette période. Mais plusieurs heures avants le départ je vois que la météo sera clémente le vendredi avec une température de 12 degrés à 4 heures du matin, du jamais vu pour moi, plutôt habitué à des nuits bien fraîches à Millau à la fin du mois d’octobre. Et pendant toute la journée la température ne descendra pas en dessous de 19 degrés, parfait pour un trail long ! Mais le doute subsiste pour le reste du week-end, notamment sur la course de dimanche, la grande course de 78 km, où Yoann doit prendre le départ avec un plateau d’élite annonçant une belle compétition pour les premières places.
Lever 2h50, la nuit à être courte mais j’ai bien eu le temps de me reposer, malgré un petit rhume qui traîne depuis la semaine dernière. Pas simple de manger à cette heure-ci si mais après un café et un sandwich, je me cale dans le milieu du peloton de départ. 4h et c’est toute l’ambiance de cette course que je retrouve avec l’excitation et le décorum : la musique, les feux de détresse rouges, les frontales qui s’allument et le départ sur la route en direction du Causse Noir. La route est large et permet au peloton de s’étirer correctement, sans causer des bouchons dans la première montée. Je ne regarde pas trop ma montre, juste de temps en temps pour ne pas partir trop vite. Le premier ravitaillement est au km19 où j’arrive après de 2h15, avec plus d’une heure d’avance sur la barrière horaire, je remplis mes flasques d’eau et repars en grignotant. Je ne mets pas la pression, j’ai déjà fait cette course il y a 4 ans en 14h30 mais j’étais plus frais que cette année et mon objectif est autre cette année, je dois la finir en moins de 19h pour pouvoir prétendre à partir en Californie, alors pas de pression. Cela fait maintenant 2 ans que je n’ai pas couru 100 km en compétition et j’ai envie de retrouver le plaisir que j’avais un peu perdu l’année dernière et l’appréhension de la blessure, après mon arrêt dû à un ménisque abimé.
Le jour se lève et les kilomètres s’égrènent dans ces paysages que je redécouvre à chaque fois. Le plaisir de courir est là et je suis déjà dans cet état, cette zone qui m’avait manquée, quand tout est simple et que l’on doit juste se laisser porter par le chemin. Cette sorte de bulle, d’état mental que l’on retrouve à chaque fois avec plaisir sur des épreuves d’endurance. Le peloton est si étiré que j’ai parfois l’impression de courir tout seul, je vois juste une lueur de frontale plus loin. On se retrouve en général dans une montée et la discussion se fait naturellement, avec certains, d’autres plus concentrés ou dans un moment difficile, ont plus de mal à papoter. Pendant une bonne partie de la course je croiserai Jean-Marc, un colosse qui me dépasse en trombe dans les descentes mais que je retrouve au milieu des bosses. Il me donne gentiment des capsules de sel car je lui dis que je sens une pointe ressemblant à un début de crampe dans le mollet et nous partageons nos impressions sur la course et notre état de fraîcheur. Le temps passe plus vite ensemble et les kilomètres aussi. J’arrive à mi-course au environ de 7 h, c’est mieux que ce que je pensais faire mais je sais qu’il reste des belles montées et ce mollet me tient toujours en respect et m’empêche de profiter des descentes comme je voudrais, mais la douleur reste supportable et surtout elle ne s’amplifie pas.
La dernière partie de la course est dans mon souvenir marqué par deux belles montées notamment celle qui se trouve avant Pierrenche du Larzac au km75 et surtout la dernière mais avec un pourcentage bien raide, la montée de la Cade au km96, je prends un rythme de croisière plus lent notamment dans les descentes mais je reste prudent, je ne veux pas me blesser sur la fin de course et je suis largement dans les temps. La nuit est tombée et les frontales sont ressortis pour la dernière descente vers la ligne d’arrivée où m’attend une partie de la Team Gore arrivée à Millau dans l’après-midi et Vincent Gaudin qui doit courir dimanche. Pendant les 200 derniers mètres je les entends hurler mon prénom comme des dingues (qu’ils sont) et une fois la ligne d’arrivée que je passe en même temps que le deuxième de la midnight, qui arrive comme une mobylette, Dominique Chauvelier qui fait le speaker, m’accueille comme si j’étais un champion grâce aux encouragements très bruyants des 3 énervés : “ho ! Y a Jésus qui vient d’arriver ! Mais c’est qui ?”
C’est juste un gars qui vient de courir 104 km pendant 16h33, comme les 925 autres coureurs qui passeront la ligne aujourd’hui.
Malheureusement pour les coureurs de la Grande course du dimanche, la météo se dégradera et l’organisation sera obligée d’annuler car des rafales sont annoncées à plus de 80 km heure et des orages pouvant les mettre en danger. Une décision sage et respectueuse de la sécurité.
Un énorme merci à toute la team Gore et à l’agence Epic pour l’organisation et la bonne humeur.